En 2024, 100 millions d’utilisateurs actifs discutent chaque semaine avec une IA générative. Derrière ce chiffre massif, un détail inquiète : la plupart d’entre eux n’ont aucune idée de ce qu’il advient réellement de leurs données personnelles.
ChatGPT et confidentialité des données : un enjeu sous-estimé
Fascination, adoption massive, et au centre du jeu, une réalité qui échappe souvent à la vigilance : la confidentialité des données. Chaque question posée à un agent conversationnel OpenAI, qu’il s’agisse de simples échanges, de morceaux de projets, ou parfois d’informations sensibles, s’inscrit dans la mémoire des serveurs d’OpenAI. Les utilisateurs, portés par la promesse d’une réponse immédiate, oublient trop vite que derrière cette apparente efficacité, les données personnelles circulent, se stockent et se croisent au fil des requêtes.
En France, la question de la sécurité et de la confidentialité des échanges suscite une préoccupation croissante. Plusieurs organes publics se penchent sur la compatibilité entre les recommandations de la CNIL et le fonctionnement peu transparent du ChatGPT d’OpenAI. La frontière entre sphère privée et échanges professionnels s’amenuise, tandis que la protection des données prévue par le RGPD se trouve confrontée à des transferts de données massifs vers les États-Unis. De nombreuses entreprises françaises prennent désormais position : limitation, voire interdiction d’accès à ces outils, dans la crainte de voir des informations stratégiques ou confidentielles s’échapper vers des serveurs hors contrôle.
Voici les principaux points de vigilance liés à cette question :
- Données personnelles : identité, contenus sensibles, éléments stratégiques partagés par l’utilisateur.
- Risques juridiques : exposition à des sanctions en cas de non-respect du règlement sur la protection des données.
- Absence de contrôle : aucune certitude quant à l’effacement réel des données saisies dans ChatGPT.
La confiance dans ces outils d’intelligence artificielle repose sur une base instable. L’utilisateur croit s’adresser à une IA, il alimente en réalité une base de données mondiale dont la gestion échappe à toute supervision citoyenne ou institutionnelle.
Quelles informations ne jamais partager avec une intelligence artificielle ?
Utiliser ChatGPT pour clarifier un point, obtenir un conseil, ou générer du contenu, c’est devenu un réflexe. Mais ce réflexe expose à des dérapages : la tentation de saisir des informations personnelles, parfois confidentielles, est forte, par habitude, par méconnaissance ou par simple automatisme. Pourtant, il existe des limites qu’il vaut mieux ne jamais franchir. La prudence n’a rien d’un excès, elle répond à une réalité : une fois transmises, les données échappent à tout contrôle individuel.
Ne saisissez jamais de numéro de sécurité sociale, coordonnées bancaires, adresses physiques, pièces d’identité ou informations de santé. Il est également sage de ne pas mentionner de détails concernant un tiers. Dès qu’une information personnelle ou confidentielle est partagée, elle devient un élément exploitable par l’algorithme, sans garantie quant à sa suppression ou à sa réutilisation à des fins non maîtrisées.
Pour clarifier les types d’informations à bannir, voici les catégories à écarter :
- État civil ou documents médicaux
- Données bancaires ou fiscales
- Identifiants d’accès (professionnels ou personnels)
- Informations stratégiques d’entreprise ou données confidentielles de clients
La saisie spontanée de ces éléments dans un agent conversationnel expose à des risques de fuite ou d’exploitation imprévue. La responsabilité de la protection des données personnelles saisies ne doit jamais être transférée à l’intelligence artificielle. Chaque donnée confiée alimente une base de données planétaire, sans promesse claire sur la sécurité ou la suppression effective.
Risques concrets pour les entreprises et les utilisateurs : ce que révèle l’usage quotidien
Les entreprises, séduites par la promesse de productivité de l’intelligence artificielle générative, découvrent rapidement la face cachée de ces outils. Dès qu’un collaborateur partage des informations sensibles dans ChatGPT, le risque devient palpable : rien ne garantit que ces données resteront confidentielles. Un développeur qui soumet un extrait de code pour obtenir une aide technique expose parfois des secrets professionnels, voire des éléments stratégiques de l’entreprise.
Le fonctionnement interne de ces plateformes reste opaque. ChatGPT collecte, analyse, conserve et exploite les fragments de chaque conversation. Impossible, pour l’utilisateur, de savoir où, comment et avec quelles finalités ses données seront réutilisées. Plusieurs entreprises, en Europe, aux États-Unis, en France, ont fait l’amère expérience de voir des informations confidentielles ressurgir dans d’autres interactions, illustrant la porosité du système.
Pour mieux comprendre les risques, voici les scénarios les plus fréquemment rencontrés :
- Fuite potentielle de données confidentielles de l’entreprise
- Réutilisation de fragments de conversations dans d’autres dialogues
- Absence totale de garantie de suppression ou de rectification des données sensibles
Les particuliers ne sont pas épargnés. Bien des utilisateurs ont vu des pans intimes de leur quotidien exposés suite à des échanges apparemment anodins. Face à l’ampleur de l’audience, la vigilance s’impose. Avec ChatGPT, chaque usage ancré dans le quotidien révèle un paradoxe : un outil qui simplifie la vie numérique peut, à son insu, disséminer des informations précieuses, sans retour possible.
Bonnes pratiques pour sécuriser l’utilisation de ChatGPT en milieu professionnel
La sécurité des données en entreprise passe par des habitudes simples, mais encore trop rarement appliquées. Dès le départ, il s’agit de fixer des règles claires : aucune donnée confidentielle, aucun identifiant, aucune information liée aux clients ne doit transiter par ChatGPT, quel que soit le contexte. Seul le strict nécessaire doit être partagé, dans le respect du cadre légal fixé par le RGPD.
L’implication des équipes fait toute la différence. Former régulièrement sur les risques liés à l’intelligence artificielle et à la gestion des données personnelles limite les failles humaines. Désigner des référents chargés de superviser l’usage de ces outils, de veiller aux paramètres de gestion des données et de contrôler les pratiques permet de renforcer la vigilance collective. Avant chaque saisie, chaque utilisateur devrait s’interroger sur la pertinence du partage d’une information.
Quelques réflexes clés permettent de limiter les risques :
- Activez, si possible, les options de non-conservation des conversations dans les paramètres de la plateforme.
- Privilégiez les versions de ChatGPT proposant des garanties contractuelles en matière de confidentialité et de traitement des données.
- Documentez vos usages : chaque interaction professionnelle avec ChatGPT doit pouvoir être tracée et expliquée.
La vigilance s’étend aussi à la sélection des outils eux-mêmes : comparer les politiques de protection des données d’OpenAI et de ses concurrents, réclamer des garanties précises en matière de sécurité, de confidentialité et de conformité RGPD, devient indispensable. S’en remettre aveuglément à l’algorithme expose à des fuites dont les conséquences, souvent irréversibles, ne se mesurent qu’après coup. Utilisez ChatGPT pour ce qu’il est : un assistant, jamais un coffre-fort.
À l’heure où l’intelligence artificielle s’installe au cœur des usages professionnels et personnels, la vigilance s’impose. ChatGPT ne trie pas vos secrets : il les collecte. Seule une discipline collective et individuelle permettra d’éviter que la promesse de l’IA ne se transforme, à terme, en machine à disséminer nos vies privées.


